Ingrid Rebergen, six ans

A peine arrivé, descendu du bus transportant sa famille pour un séjour d’été dans la maison, Eric court dans le jardin pour essayer d’attraper les papillons autour de la lavande! «Maman, ça me fait du bien d’être ici». Eric a six ans et nous sentons tout de suite combien sa maman est importante pour lui: «Ma maman, elle sait plein de choses!». Et les vacances, c’est un temps pour être ensemble! Eric a toujours un œil sur ce qui se passe: «Où sont les balais?», demande-t-il quand il voit sous la table ce que sa petite sœur a laissé tomber de son assiette.

Etre à la hauteur de ces enfants portant des responsabilités qui les font grandir vite, trop vite et quidemandent de pied ferme à etre pris en compte, tant ils savent de la vie…

Eric peut bousculer celles et ceux qui l’entourent. Des fois, sa colere monte, il jette le jeu, le livre que pourtant il préfère! II a été exclu des lieux périscolaires de sa ville, il a fallu lui trouver un foyer. Sa maman voit défiler sa propre enfance, malmenée, en foyer aussi, puis à la rue. Elle avait pourtant tant espéré, cherché, tout fait pour qu’Eric puisse grandir en famille avec ses petits frères et sœurs. «On a oublié Freddy!» Eric fait attendre tout le monde jusqu’à s’assurer que son petit frère soit sur la photo de groupe du dernier jour des vacances!

Noé et sa famille ont aussi été présents cet été-là. Noé est ce petit bonhomme de deux ans qui unit tout le monde dans une grande joie: grandes sœurs, maman, grand-maman, grand-papa.

Lors d’une visite, la maman de Noé nous fait part de son épuisement. Elle a dû expliquer à la directrice de la crèche que s’il ya des remarques à faire à propos de Noé, elle veut les entendre en premier lieu et non les recevoir par des services intermédiaires. De plus, elle a reçu le congé de son appartement – son propriétaire veut le récuperer. Elle sait par experience que si elle se retrouve à la rue, Noé lui sera retiré comme l’ont été ses deux grands enfants: «Ce serait le pire de ma vie». Elle, dont la fierté est d’avoir gagné la garde de son fils dès la naissance.

Une solidarité se crée autour d’elle, en premier la grand-maman qui cherche de lieu en lieu un nouveau logement.Des professionnelles aussi: la puéricultrice téléphone à la maman, même en dehors de ses heures de travail, prend des nouvelles et se soucie de cette recherche. Une jeune juriste, devenue volontaire permanente de notre Mouvement, s’engage avec la famille: «Apprendre des gens. Prendre le temps de l’observation sans juger, se former avec la personne qu’on rencontre pour savoir l’accompagner.»

II est urgent, au seuil de cet hiver qui s’annonce si difficile, de comprendre plus profondément les réalités qui touchent les plus pauvres de notre pays.

Briser l’ignorance, là où non seulement les coupures de chauffages peuvent être les plus graves, mais encore plus fondamentalement les coupures des liens familiaux et sociaux.

Noël sera beau. L’espérance d’un nouveau logement pour la famille de Noé se nourrit de solidarités actives et prometteuses.

Noël sera beau. Tout enfant est créateur de liens qui donnent force à ses parents pour continuer à lutter et à espérer.

Noël sera beau avec vous toutes et tous qui faites partie de ces liens bâtisseurs de dignité et d’humanité.

Corinne Martin, Coprésidente

Anne-Claire Brand, Coordination nationale

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